Le 27 février est aujourd’hui une fête nationale, célébrée dans tout le pays. Le 27 février 1844 est proclamée l’Indépendance de la République dominicaine vis-à-vis de l’Empire d’Haïti, qui l’occupait depuis 1822…
Le 5 décembre 1492, Christophe Colomb atterrit sur l’île de Quisqueya, où sont établis les Taïnos, un peuple de pêcheurs et agriculteurs. C’est lors de son deuxième voyage en 1493 qu’il colonise l’île, renommée Hispaniola, y établissant la première colonie espagnole des Amériques. Toutefois cette colonisation entraîne l’extinction de la quasi-totalité des Taïnos, à cause des maladies importées d’Europe, de la guerre et de leur mise en esclavage. Puisque la population locale n’est plus suffisante pour travailler dans les mines et les plantations, les monarques espagnols autorisent en 1501 l’importation d’esclaves africains.
Au cours du XVIIIe siècle, la colonie Santo Domingo est en déclin. En effet, la couronne espagnole perd son intérêt pour la colonie avec la découverte de l’or en Amérique centrale et du sud. En 1795, le traité de Bâle fait passer le territoire sous domination française, alors que la partie occidentale de l’île, Saint-Domingue, est aussi sous domination française. Toutefois dès 1791, la France fait face à une grande révolte des esclaves de son côté de l’île, qui se conclue le 1er janvier 1804 avec la proclamation de l’indépendance d’Haïti, la première république noire. Une première tentative d’unification de l’île est menée en 1801 par Toussaint Louverture, leader de l’indépendance haïtienne, mais ce n’est pas concluant puisqu’il est capturé par les français et envoyé en prison, où il meurt. Avant cela, il parvient tout de même à abolir l’esclavage sur le territoire.
Par la suite, en 1808, lors de la guerre de la France napoléonienne contre l’Espagne, sont envoyés à Santo Domingo des émissaires espagnols pour soulever la population contre la France. C’est un succès puisque les habitants de la colonie se soulèvent contre le pouvoir français pour défendre la couronne espagnole, permettant ainsi le retour de Santo Domingo sous la domination de l’Espagne.
Un mouvement indépendantiste naît au cours des années suivant le rétablissement de la colonisation espagnole. À la fin de l’année 1821, José Núñez de Cáceres proclame l’indépendance vis-à-vis de l’Espagne, ainsi que l’adhésion du pays, renommé Haití Español, à la Grande Colombie de Simon Bolivar (qui comprend alors les territoires du Panama, de la Colombie, du Venezuela et de l’Equateur actuels). Seulement, la détermination des élites dominicaines à conserver leurs privilèges et les institutions coloniales sur lesquelles elles reposent intactes, voue cette expérience à l’échec après deux mois. Dans le même temps, un groupe de politiciens et militaires dominicains exprime l’envie d’unir l’île d’Hispaniola à nouveau.
Indépendant depuis 1804, l’Empire d’Haïti a pour président Jean Pierre Boyer, qui promet protection et soutien aux Dominicains. Il entre dans le pays avec des milliers de soldats en février 1822, après que de nombreuses villes lui aient prêté allégeance. Il entre ainsi dans la capitale dominicaine, Santo Domingo, en vue de gouverner le pays. Il est relativement bien accueilli, mais le gouvernement haïtien devient rapidement impopulaire auprès des Dominicains, qui sont désireux d’un changement. En effet, Boyer tente de réprimer l’identité dominicaine en interdisant l’usage de l’espagnol et en confisquant les biens de l’Eglise catholique, en plus d’exproprier de nombreuses propriétés et d’imposer une forte taxation au peuple. Aussi, en 1827, Boyer promulgue le Code rural qui rétablit le système des plantations et du travail forcé (après avoir abolit l’esclavage pour la deuxième fois en 1822).
En 1838, Juan Pablo Duarte fonde la société secrète La Trinitaria avec Ramón Matías Mella et Francisco del Rosario Sánchez, qui a pour objectif de renverser le pouvoir haïtien par un coup d’Etat. Après un premier échec le 12 juillet 1843, Duarte s’allie à un groupe conservateur dirigé par Buenaventura Baez. Enfin, le 27 février 1844, la libération est déclarée à la Puerta del Conde par Juan Pablo Duarte, Ramón Matías Mella et Francisco del Rosario Sánchez. La Première République dominicaine est proclamée. Il est important de savoir que les groupes indépendantistes ne passent à l’action qu’une fois le président Boyer renversé. En effet, ce dernier renonce au pouvoir le 14 mars 1843, après une longue période de révoltes sociales des populations noires dominicaines. Juan Pablo Duarte, s’il est aujourd’hui connu comme leader de l’indépendance de la République dominicaine, a ainsi bénéficié des efforts du peuple dominicain, dont il ne faut oublier le rôle majeur.
L’indépendance de 1844 enclenche le début de plusieurs invasions de la République dominicaine par Haïti, qui souhaite conserver la mainmise sur le territoire. C’est après douze ans de conflit que les Dominicains chassent Haïti définitivement, avec le soldat Pedro Santana en qualité de président. Le conservateur Santana hérite d’un gouvernement en banqueroute, et souhaite obtenir le statut de protectorat des Etats-Unis ou d’une puissance européenne. Il sollicite ainsi la reine Isabelle II d’Espagne pour qu’elle reprenne contrôle du pays. C’est la seule ex-colonie espagnole qui est revenue sous le contrôle de l’Espagne après son indépendance. Sous ce nouveau régime colonial, Santana devient Capitaine Général jusqu’à sa mort en 1864, mais tous les bureaucrates dominicains sont remplacés par des Espagnols.
Toutefois, les politiciens libéraux, eux, n’acceptent pas d’être à nouveau soumis à la couronne espagnole. La guerre de Restauration commence afin de libérer le pays, à nouveau. Enfin, les Dominicains obtiennent le départ des forces espagnoles en 1865, établissant ainsi la Seconde République dominicaine. Avec la nouvelle indépendance, les conflits internes entre conservateurs et libéraux continuent jusqu’en 1878.
Aujourd’hui, le Jour de l’Indépendance est célébré le 27 février en République dominicaine, marquant ainsi la date de libération vis-à-vis de son voisin haïtien. Le 27 février coïncide avec le carnaval qui a lieu tout au long du mois de février chaque année. De nombreuses célébrations prennent place dans les rues, avec des défilés de chars et des déguisements traditionnels.
Emilie Ruiz
Sources :
HIGMAN B. W., A Concise History of The Caribbean, Cambridge, Cambridge University Press, 2010.
RUDEL Christian, La République dominicaine, Paris, Editions Karthala, 2001.
Independencia de República Dominicana, https://www.historiadelnuevomundo.com/independencia-republica-dominicana/
Instragram, @invhistory
Youtube, El Mapa de Sebas
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