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Photo du rédacteurECIAPanthéonSorbonne

Quel avenir pour l’Espagne après les élections du 10 novembre 2019 ? 


Les Espagnols sont retournés dimanche 10 novembre 2019 aux urnes pour la quatrième fois en quatre ans. Cela est dû à la situation d'instabilité politique qui dure que le bipartisme a volé en éclats en 2015 avec l'entrée en force au Parlement de Podemos (gauche radicale) et de Ciudadanos (centre droit). Ainsi, les 37 millions d’électeurs ont été appelé à élire un nouveau Parlement, six mois après les dernières législatives d’avril 2019, suite à l’impossibilité du Parlement d’élire un chef du gouvernement.

Toutefois, même si le parti socialiste arrive de nouveau en tête lors du scrutin de ce 10 novembre 2019, les 350 sièges du Congrès des Députés ont été redistribués d’une différente façon que celle qui a été effectué le 28 avril 2019.

Le chef du Gouvernement, Pedro Sanchez (PSOE), n’a pas obtenu la majorité parlementaire qui lui aurait permis de former un gouvernement (176 sièges nécessaires). Par conséquent, si le PSOE essaye de former un gouvernement, celui-ci ne pourra pas s’appuyer sur un soutien des députés, le budget et le vote des lois sera ainsi compliqué.

De quelle façon est désigné le Président du Gouvernement espagnol ?

L’Espagne est une monarchie constitutionnelle ou le roi (Felipe VI) est le chef de l’Etat mais le pouvoir exécutif est assumé par Le Gouvernement de la Nation présidé par le Président du Gouvernement. L’élection du Président du Gouvernement ne se fait pas de forme directe par les électeurs mais de façon indirecte par le pouvoir législatif pour un mandat de 4 ans.


La procédure est écrite à l’article 99 de la Constitution espagnole :

« 1. A la suite de chaque renouvellement du Congrès des députés, et dans les autres cas où la Constitution le prévoit, le roi, après avoir consulté les représentants désignés par les groupes politiques dotés d'une représentation parlementaire, et par l'intermédiaire du président du Congrès, propose un candidat à la présidence du gouvernement.

2. Le candidat proposé conformément aux dispositions du paragraphe précédent expose devant le Congrès des députés le programme politique du gouvernement qu'il entend former et il sollicite la confiance de la chambre.

3. Si le Congrès des députés, par le vote de la majorité absolue de ses membres, accorde sa confiance au candidat, le roi le nomme président. Si cette majorité n'est pas atteinte, la même proposition est soumise à un nouveau vote quarante-huit heures après la précédente, et la confiance sera considérée comme accordée si elle obtient la majorité simple.

4. Les votes précités étant effectués, si la confiance n'est pas accordée pour l'investiture, on examinera des propositions successives dans les formes prévues aux paragraphes précédents.

5. Si, un délai de deux mois étant écoulé depuis le premier vote d'investiture, aucun candidat n'a obtenu la confiance du Congrès, le roi dissoudra les deux chambres et convoquera de nouvelles élections avec le contreseing du président du Congrès. »


C’est suite à l’échec de cette procédure que le Parlement espagnol a été dissout le 23 septembre 2019 et que le 10 novembre eu lieu de nouvelles élections.


Quelles sont les raisons qui ont plongé l’Espagne dans une instabilité politique depuis 2015 ?


Premièrement, le bipartisme qui guidait la vie politique espagnole a cessé. Ce bipartisme était constitué d’une alternance entre le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) force de centre-gauche social-démocrate et le Parti populaire (PP), qui représente la droite conservatrice. Lors des élections législatives du 20 décembre 2015, ce bipartisme s’est brisé par l’entrée au Parlement de la force de gauche radicale (Podemos) et la formation de centre-droit (Ciudadanos).


Deuxièmement, la question indépendantiste catalane, a eu un impact fort sur la vie politique espagnole. La Catalogne est la deuxième région la plus peuplée d’Espagne avec 7,5 millions d’habitants.

Actuellement, un tournant a eu lieu suite à la condamnation de 9 indépendantistes catalans pour leur rôle dans la tentative de sécession en 2017. Le Tribunal Suprême d’Espagne a condamné 9 indépendantistes à des peines allant de 9 à 13 années de prisons le 14 octobre pour sédition, et détournement de fonds.

Aucune sortie de crise concernant ce dossier n’est actuellement en cours. Sous la pression du Parti Populaire, Pedro Sanchez refusa de suspendre l’autonomie de la région et de destituer son président séparatiste, Quim Torra car cela aurait pu avoir pour conséquence de favoriser la droite.


Actuellement, si l’instabilité politique espagnole a mené à ce que de nouvelles élections aient eu lieu, cela résulte de deux autres constats : - La gauche espagnole n’arrive plus à s’unir et depuis 2015, les scissions continuent. Le

PSOE de Pedro Sanchez, n’a pas souhaité s’appuyer sur le groupement Unidas Podemos (Podemos, la Gauche unie et Equo), pour constituer une majorité. Ce refus est dû à la division entre ces deux groupements sur la question nationaliste catalane. A cela ce sont ajoutés des divisions internes au sein du parti Podemos avec la création par Inigo Errejón (ex-secrétaire général de Podemos) du parti Mas Pais pour ces élections de novembre.

- La droite de Pablo Casado, n’a pas réussi également à s’unir et a vu se voir former les parti Ciudadanos (centre droit) et Vox (extrême droite). La droitisation de la droite a vu les membres du Parti Populaire rejoindre le parti Ciudadanos. A cela s’ajoute les émeutes dans les rues de Barcelone. De cette crise, le parti Vox (extrême droite) a

réussi à en faire un appui qui lui a permis de devenir depuis le 10 novembre 2019, la troisième puissance politique du pays.


En effet, suite au dépouillement des bulletins de vote, Vox dirigé par Santiago Abascal, a continué son ascension en obtenant 52 sièges, soit 28 de plus que lors des élections d’avril 2019. Le parti socialiste (PSOE) de Pedro Sanchez compte 120 députés contre 123 lors du précédent scrutin d’avril 2019. Le parti populaire de Pablo Casado a redressé la barre suite au pire résultat de leur histoire obtenu en avril en passant de 66 sièges à 87.

La gauche radicale que forme la coalition Unidas Podemos a perdu des députés et passe de 42 à 35 sièges. La gauche républicaine de Catalogne, ERC, (parti politique indépendantiste catalan de gauche) qui défend l’instauration d'une république indépendante en Catalogne se maintient en passant de 15 à 10 sièges.

Les plus grands perdants de ce scrutin sont les libéraux de Ciudadanos qui passe 57 à 10 sièges au Congrès des députés. Leur chef, Albert Rivera, a annoncé sa démission, ce lundi 11 novembre.

Ces résultats montrent qu’aucun parti n’a réussi à obtenir la majorité absolue permettant

de former un gouvernement. La formation d’un gouvernement sera ainsi compliquée.

Si une union de gauche devait se former (PSOE, Unidas Podemos, Mas Pais), elle semble difficile à être mise en œuvre et ne réuniraient que 158 sièges sur les 176 nécessaires.

De même, une union de la droite (PP, Ciudadanos, Vox) risque de se voir une gauche s’unir, qui conduirait à l’inapplicabilité de l’article 99 de la Constitution espagnole et ramènerait de nouveau les espagnoles devant les urnes. De plus une alliance de la droite n’obtiendrait que 149 sur les 176 nécessaires.

Deux solutions peuvent s’offrir au peuple espagnol pour sortir de la crise politique : - Soit l’Espagne voit se former une grande coalition à l’Allemande, (cas jamais vu en Espagne) par l’union du PSOE et du PP, qui atteindrait 207 sièges. Cette hypothèse est très peu probable par la division de pensée trop grande entre la gauche et la droite. - Soit, un gouvernement minoritaire conduit par le PSOE de Pedro Sanchez est mis en place par une abstention du PP lors du vote de confiance. Cette hypothèse forcera le gouvernement à négocier des appuis au cas par cas au Parlement pour pouvoir légiférer.

Ainsi, suite aux élections de ce 10 novembre 2019, aucune solution claire ne s’offre pour pouvoir former un gouvernement stable et l’Espagne risque d’être toujours sans gouvernement avant 2020 car les discussions vont être longues pour pouvoir trouver une porte de sortie.


Jesús Saccaco

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